Chapitre 1 : comme une proie face à un prédateur

Attention, ce chapitre contient des passages violents pouvant heurter la sensibilité de certaines personnes.

Un son strident la réveilla de sa stupeur, très vite suivi d’un grand fracas.

« Humni !! »

Lena sursauta mais n’eut même pas le temps de réaliser ce qu’il se passait qu’un corps immense tomba devant elle en hurlant. Le paysage rouge qui se déployait jusqu’alors devant ses yeux fût instantanément remplacé par une chair noire. Elle leva lentement la tête, croisant le regard d’une paire de dangereux yeux rougeoyant. Cette vision lui fit froid dans le dos. Depuis ces quinze minutes où elle avait atterri ici, jamais Lena ne s’était autant maudite. Plus jamais elle ne succomberait à l’attrait des choses inhabituelles ! Jusqu’à présent, sa vie avait peut-être été banalement ennuyante, toutefois, cela était toujours bien mieux que cette dangereuse nouveauté. Oui, dangereuse. Car elle pouvait le voir dans ces deux sphères brunes qui la regardait de haut. Elle pouvait voir un éclat s’y former et cette lueur les traversant était tout sauf amicale ! La jeune femme n’était pas en sécurité. Chaque coin de sa tête lui criait « cours ! Dépêche-toi ! ». Elle se sentait comme une proie face à un prédateur affamé.

Son corps ne semblait plus vouloir rester en place, tremblant sous la pression qu’elle ressentait. Au moment où elle allait se tourner et s’enfuir aussi vite qu’elle pouvait, une main agrippa violemment son épaule, presque au point de la briser. La jeune femme lâcha un cri de douleur. Il n’y avait pas eu de craquement, pourtant elle crût en avoir entendu. Son épaule la brûlait. Son bras la lançait. Lena voulait s’extraire de cette poigne mais à chacun de ses mouvements, celle-ci se resserrait, rendant le moindre geste encore plus douloureux que le précédant. La voix rocailleuse et un peu nasale du corps noir devant elle résonna sur un ton moqueur. La jeune femme se sentit pâlir et son sang sembla alors se geler. Elle n’était pas bête. Elle avait bien ressenti ce timbre menaçant dissimulé derrière la moquerie. L’inconnu, lui, semblait ravi. Comme pouvait le confirmer le sourire sinistre qui se traçait lentement sur son visage.  

Lena ne comprenait aucun des mots prononcés. Ce n’était pas dû au fait qu’elle était trop effrayée pour les écouter mais plutôt parce qu’elle ne reconnaissait pas le langage utilisée.  Elle avait comme un sentiment étrange. Presque comme si cette langue lui était familière mais pourtant étrangère. Toutefois, avant que la jeune femme n’ait pu se questionner davantage, elle aperçut à travers le rideaux de larme s’étant formé devant ses yeux que la silhouette noire se rapprocha encore un peu plus d’elle. Une autre main l’attrapa à la gorge. Lena eut soudainement le souffle coupé. Ses larmes ne pouvaient plus attendre et se laissèrent tomber le long de ses joues. Plus aucun son ne sortit de ses lèvres alors qu’elle cherchait désespérément une bouffée d’air.

Le corps noir la souleva lentement du sol. Alors qu’il sentait la jeune femme se débattre, son sourire ne fit que s’élargir. Une autre phrase s’échappa de sa bouche. Cette fois-ci, toutefois, elle reconnut un mot. « Humni ». Encore ce mot. Le premier qu’elle avait entendu. Que pouvait-il bien signifier ? Lena essaya de regarder au-delà du flou que ses larmes avaient formé, c’est à ce moment qu’elle le vit finalement en entier.

Le crépuscule laissa sa place à la nuit. La jeune femme avait déjà vu le noir. Une chair noire comme le charbon, virant au gris foncé. Des cheveux noirs de jais et un pantalon tellement en mauvais état que sa crasse le noircit. Maintenant, elle pouvait clairement voir le rouge. Des yeux marrons-rouge un peu distrait, émettant une lueur menaçante. Des mains et des pieds couverts de sang sombre, séché depuis un moment déjà, ainsi qu’une empreinte cramoisi qui trônait de façon troublante sur son torse nu.
Cette chose était grande. Faisant environ 2 mètres si on en croyait le fait qu’il semblait bien dépasser la taille de la fille d’au moins deux ou trois têtes. Lena ne sentait plus ses pieds toucher le sol, ni ne pouvait hocher la tête. Toutefois, la jeune femme savait qu’elle avait été soulevée assez haut. Dans les quelques respirations qu’elle lutta à prendre, son nez capta une haleine fétide sortant de la bouche de la masse noire en face d’elle. Des dents plus aiguisées que les siennes apparurent sous ses yeux. Lena se sentit mal et elle manqua de tourner de l’œil. Cependant, elle ne voulait pas abandonner. Elle ne voulait pas mourir. Pas maintenant. Pourtant, la chose était puissante. Par instinct, Lena avait agrippé la main qui l’étouffait, griffant et repoussant le bras. Néanmoins, cela ne déstabilisa même pas le colosse. Comme si la créature ne ressentait rien. En fait, Lena voyait bien que sa lutte était complètement inefficace. Malgré que ses ongles saignaient et la faisaient souffrir, aucune trace de griffe ne pouvait être aperçu sur le bras qui la tenait. Au contraire, la soulever à un bras semblait si facile pour cette chose.

La jeune femme ne pouvait plus endurer davantage. Lena sentait qu’elle allait mourir d’étouffement si elle ne prenait pas une profonde inspiration immédiatement. Elle devait réfléchir rapidement à un moyen de se libérer. Une poussée d’adrénaline monta en elle, la faisait oublier la douleur dans son bras. Comme il n’y avait rien que ses mains ne pouvaient faire, la fille fouilla dans ses poches en espérant trouver quelque chose d’utile… N’importe quoi ! Heureusement pour elle, sa main toucha quelque chose de dur. Sans réfléchir davantage, elle le sortit et poignarda les yeux rouges moqueurs aussi fort qu’elle put.

Un hurlement de douleur résonna sur le silencieux plateau. Un liquide éclaboussa le visage de Lena, l’aveuglant momentanément alors qu’elle fut immédiatement jetée à terre. Son dos heurta la terre ferme en soulevant au passage un nuage de poussière ocre. L’impact lui fit à nouveau perdre le souffle. Le corps noir continua de crier tout en couvrant son œil droit avec ses deux mains. Un liquide pourpre glissait le long de ses doigts, coulant jusque dans son cou. Toutefois, la jeune fille n’avait pas le temps d’admirer l’étrangeté du corps devant elle. Dès qu’elle reprit son souffle, Lena traîna son corps loin du monstre, courant aussi loin qu’elle le pouvait. Le cri de douleur se transforma vite en cri de colère.

Elle devait s’enfuir ! Se cacher ! Ou quelque chose de très grave allait lui arriver. Son cœur battait la chamade. Plus vite que jamais. Assez vite pour lui faire mal à la poitrine. La jeune femme était terrifiée. Elle pouvait sentir la mort sur ses talons. Une soudaine envie de vomir s’empara d’elle, mais elle n’avait pas le temps pour ça. La fille ne pouvait pas se permettre de ralentir et de laisser la panique l’envahir. Et pourtant, elle était déjà complètement paniquée.

Dans sa course désespérée contre la mort, Lena ne le sentit même pas s’approcher d’elle. Elle pensait avoir couru une bonne distance mais ce n’était qu’à peine quelques dizaines de mètre. Toutefois, ce qui l’abattu vraiment était que malgré sa course effrénée, la créature l’avait déjà rattrapée.
Une main agrippa ses vêtements, claquant la fille à terre. Lena ferma les yeux par instinct mais cela n’empêcha pas l’impact. Une fois encore, la douleur l’envahit. Sa mâchoire percuta le sol en premier, forçant ses dents à s’enfoncer dans l’intérieur de ses joues. Ensuite, elle érafla la délicate peau de son visage et de ses bras. Son corps lui faisait mal partout et ses lèvres et bras saignaient. La fille avait toujours vécu une vie paisible. Les seuls moments où elle avait pu se blesser se résumaient à une légère coupure. Jamais elle n’avait subi de telles plaies.
Son épaule gauche la faisait tellement souffrir qu’elle la pensait démise. Sa bouche avait un goût de sang et elle ressentait une douleur lancinante au niveau de ses bras et ongles écorchés. Enfin, Lena pouvait encore ressentir la sensation de la main ayant essayé de fermement l’étouffer. C’était si douloureux. Au point où elle souhaitait que tout s’arrête et qu’on la laisse enfin tranquille.

Cependant, la réalité n’était jamais aussi douce. La créature appuya un de ses genoux sur le dos de la fille pour l’empêcher de s’échapper plus loin. Puis, elle serra son cou une fois de plus. La chose ne jouait plus. Ne trouvant plus cela amusant du tout, le monstre voulait rendre la fille tranquille et docile. Maintenant.

« Non ! Dégage ! Lâche-moi ! …. Putain mais laisse-moi tranquille ! »

Hurla-t-elle désespérément d’une voix aigu. Un mélange de peur et de stresse s’empara d’elle. Lena pouvait entendre les battements de son cœur résonner bruyamment dans ses oreilles. Elle avait peur. Au point de ne même plus sentir les larmes qui s’écoulaient abondamment de ses yeux. Vraiment peur. Lena resserra sa poigne sur l’objet qui venait de la protéger, sans réaliser que pendant tout ce temps, elle avait confié sa vie à une paire de clefs. Si peur. Au point où elle en était, réfléchir ne servait plus à rien. La jeune femme ne pouvait plus compter que sur son instinct. De ce fait, alors que la créature agenouillée au-dessus d’elle déblatérait furieusement des mots incompréhensibles, Lena poignarda la seule partie de ce corps qu’elle pouvait atteindre. Cependant, ça ne transperça pas sa peau cette fois-ci. Avait-elle mal visé ? Une sueur froide lui parcourut l’échine. Sa main était engourdie et tremblait. La jeune femme dû lâcher sa clef car le choc de l’impact lui retira toute force dans sa main. Lena ne savait pas ce qu’elle venait d’essayer de poignarder mais une chose était sûre c’était quelque chose de dur. Vraiment dur. Un rire emplit de folie retentit, faisant frissonner la fille de plus belle. Respirer commençait à devenir difficile alors que la terreur s’emparait d’elle, la faisant s’hyperventiler.

La voix rauque résonna sur un ton sinistre, énonçant le même mot une fois encore. Lena ne savait pas pourquoi elle était aussi focalisée sur ce mot. Peut-être était-ce le fait qu’il était le seul qu’elle comprenait clairement ou bien parce que c’était le premier qu’elle avait entendu. En tout cas, à chaque fois qu’elle l’entendait la jeune femme ne pouvait s’empêcher de se le répéter inconsciemment.

« Mais c’est quoi ce “humni” à la fin ? Merde ! Laisse moi tranquille, bordel !! Assez !…. Dégage… »

Cria-t-elle désespérément alors qu’elle agitait ses bras pour faire face au monstre. La créature ricana, ne ressentant pas le besoin de réagir contre la futile tentative de défense de la jeune femme. Lena, elle, était trop terrifiée pour parler de façon cohérente. Même ses pensées étaient devenues confuses, sautant d’une idée à une autre. Toutefois, bien que la peur brouillait toute rationalité chez la jeune femme, une phrase résonnait clairement dans son esprit. Vite. Vite réfléchis ! Réfléchis et bouge ! Ne le laisse pas te tuer. Fait quelque chose… Vite, BOUGE !

En réaction à cette pensée, Lena scanna les environs d’un regard. Pas de cailloux, ni de pierres. Pas de bâtons. Vite. Poussière ? Non. Incapable de bouger. Vite. Arme ? Main ? Inefficace. Vite, dépêche-toi… Main ? Téléphone, flash, TÉLÉPHONE !

La fille regarda ses mains ensanglantées se trouvant juste devant son visage alors que cette idée lui vint à l’esprit. Elle attrapa rapidement son bracelet. Malheureusement avant qu’elle pu faire quoi que ce soit, des dents tranchantes vinrent transpercer son épaule, près de sa clavicule. Un cri perçant s’échappa des lèvres de la jeune femme. Son sang coulait à flot, tintant le sol d’une nouvelle nuance de rouge. La créature le suçait comme si elle goûtait à un mets fin. Évidemment, la jeune femme essaya de se débattre mais elle était fermement maintenu contre le sol. Incapable de bouger d’un centimètre. Lena avait mal. Si mal qu’elle ne savait plus si elle espérait tomber dans les pommes ou si sa vision était vraiment en train de s’obscurcir.

Un rire frénétique résonna dans ses oreilles. Intérieurement, Lena pleurait et suppliait. Elle voulait rentrer chez elle. Elle voulait que cette chose meurt ! Qu’elle disparaisse ! Pourtant, plus aucun son ne sortait de sa bouche. Sa gorge était comme nouée par la douleur et l’effroi. Lena ne pensait pas qu’il était possible qu’elle puisse souffrir davantage. Pourtant si. Et elle voulait presque mourir pour que cette douleur cesse, alors que la créature planta une nouvelle fois ses dents dans sa chair.

Paniquée et en rage, elle ne sentait plus aucune sensation dans son bras gauche. Cela lui prit toute sa volonté pour le bouger car elle ne voulait pas finir comme ça. Elle ne voulait pas abandonner. La jeune femme serra donc la mâchoire et agrippa son poignet droit. C’était douloureux. Elle sentit un choc électrique parcourir son bras gauche en commençant de son épaule. Pulsant. Brûlant. Mais quelle partie de son corps ne la faisait pas souffrir actuellement ?
C’était une question de vie ou de mort et elle souffrait déjà tellement qu’elle pouvait bien en supporter un peu plus. Non. Elle le devait.
Lena ne pouvait pas voir clairement ce qu’elle faisait, les larmes débordant de ses yeux brouillaient sa vision. Cependant elle n’en avait pas besoin. Après tout, la jeune femme savait exactement ce qu’elle cherchait.

Elle toucha son bracelet et appuya sur la pierre centrale blanchâtre qu’il ornait. Son bijou se sépara alors en deux parties. Celle inférieur glissa le long de son bras pour s’arrêter vers le milieu de son avant-bras, alors que la partie supérieur, contenant la pierre, ne bougea pas de place. Les deux parties étaient reliées par une sorte de verre semi-opaque et flexible, transformant le bracelet qu’elle portait alors en une sorte de manchette. Une dizaine de petits carrés apparurent alors sur le verre, chacun ayant un motif différent. Lena essaya de cliquer sur l’un d’entre eux, cependant la douleur et le stresse firent trembler sa main. Elle le manqua alors de quelque millimètre, appuyant sur une autre icône. Une fenêtre s’ouvrit, lui précisant que la connexion au réseau était indisponible. Néanmoins, Lena n’y prêta pas attention. Elle était trop occupée à appuyer sur le pierre pour pouvoir retourner en arrière. La jeune femme essaya de se calmer mais son cœur ne cessait de battre la chamade. Elle avait mal. Elle avait peur. Et elle savait qu’elle devait se dépêchait avant que le monstre noir ne s’aperçoive de quelque chose. La fille ne pouvait pas se permettre une autre erreur. C’était sa dernière chance et son dernier espoir. Lena réessaya, plus lentement cette fois, pour toucher correctement la case qu’elle voulait malgré ses tremblements. Une fois réussit, elle recouvrit vite son poignet de sa main gauche.

Le monstre, qui jusqu’à présent était en train de mastiquer son épaule, relava la tête et passa sa langue le long de ses lèvres ensanglantées. Un air satisfait se dessina sur son visage, alors que le liquide qu’il venait d’absorber s’échappait de sa bouche et gouttait sur Lena. Il avait sentit que sa proie avait soudainement fini de se débattre. Était-elle morte ? Son œil restant jeta un bref coup d’œil à la fille. Son regard croisa celui de Lena avant d’être attiré par le mouvement de sa main.
Lena ne pouvait pas laisser passer cette chance. Dès qu’elle se rendit compte que le monstre la regardait, elle retira sa main qui cachait son bracelet. La case contenant un dessin d’ampoule avait été enfoncée. Une vive lumière blanche apparu alors de la pierre et Lena dirigea, du plus vite qu’elle pu, son poignet vers le visage de la créature, pour l’aveugler.

Surpris par ce soudain rayon de lumière, le monstre grogna avant de s’écarter en arrière. Lena en profita pour vite se mouvoir. Son plan était simple, éblouir la créature pour échapper à son emprise. Cependant, tout ne se passa pas comme elle l’avait prévu. Tout ce que son petit flash réussi à faire, fut de stupéfier momentanément le colosse, sans pouvoir l’ôter complètement de sur son dos. La jeune femme se débattu pour se libérer mais compris vite que cela était inutile. Elle n’avait plus le temps ni la force de réfléchir à un stratagème et commença à se résigner à contrecœur. C’est peut-être mieux ainsi… Même si Lena réussissait à s’enfuir, elle n’aurai pas été bien loin. La preuve était qu’elle avait essayé et le résultat était la situation dangereuse dans laquelle elle se trouvait actuellement.

Tout se passa rapidement. Elle voulu renoncer mais au fond d’elle, la fille savait qu’elle en était incapable. Alors, lorsque la jeune femme vit monstre vaciller, Lena tourna tant bien que mal son buste vers la masse noir. Si son corps ne voulait plus l’écouter, alors elle non plus ne l’écouterai plus. Elle fit donc abstraction de toute douleur.

« Putain… mais… jt’ai dis LÂCHE MOI ! »

Cria-t-elle avant de poignarder le seul endroit qu’elle était sûre de pouvoir transpercer.

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